Série - Chambres et lits dans l'Art

L'Annonciation de Rogier Van der Weyden, réalisée à l’huile sur des panneaux de chêne, aurait été la partie centrale d’un triptyque exécuté par le peintre vers 1440.
La scène se déroule dans un intérieur cossu. Marie, les cheveux dénoués, est assise sur le sol devant un pupitre et lit. Gabriel est debout en face d’elle, couvert d’une cape dorée richement brodée. Le caractère divin est ici moins évident car il est inscrit dans une très savante codification.Plusieurs éléments rappellent le Christ : les feuilles de vigne sur le vêtement de l’ange (" Je suis la vigne ") ; la bougie éteinte attend la lumière du Sauveur ; le médaillon dans le baldaquin représente un Christ en majesté ; la grenade symbolise à la fois la Passion et la fécondité.
D’autres éléments sont un hommage à Marie : les trois fleurs ouvertes du lys symbolisent les trois états de la virginité de Marie (avant, pendant et après) ; les étoiles formées par le dallage rappellent que Marie est l’étoile du matin ; la fiole transparente représente la naissance miraculeuse et la virginité. D’autres symboles peuvent encore être identifiés : la bassine et l’aiguière représentent la purification par l’eau ; les lions sur les accoudoirs rappellent ceux du trône de Salomon ; les dragons du lustre incarnent le Mal.

"La conception de Merlin", France, 1450. Voyons, ça fait tout de même plus de 570 ans… Ultra contemporain.

Une célèbre enluminure, "Comment Merlin fut engendre du diable. Et comment il fut amoureux de la dame du lac". Issu du livre Lancelot de 1494.
Toussaint Dubreuil, (1561 - 1602), "L'Amour endormi".
Le jeune homme endormi n’a pas les ailes de l’Amour mais seulement, à côté de son lit, son arc et ses flèches. Ces attributs sont aussi ceux d’Apollon. Le personnage qui monte sur le lit semble ivre, de vin ou d'amour ? A l’arrière-plan, une violente scène assez étrange pour illustrer l'amour. L’usage du papier préparé bleu était une jolie méthode utilisée alors.
Jean-Honoré Fragonard, "Le Verrou", 1777.
Simple scène de genre, dans l’esprit grivois de l’époque fin d’Ancien Régime, ou bien tableau d’histoire moralisant qui bouleverse intentionnellement la hiérarchie des genres. A première vue, il s’agit d’une scène galante : une femme résiste faiblement aux ardeurs amoureuses de son amant qui ferme le verrou de la chambre. L’œuvre est remplie de détails intrigants, tous plus symboliques les uns que les autres. Si on s’en tient à la logique de l’instant, l’homme qui ferme la porte n’a pas atteint son but. Une question nous traverse alors l’esprit : pourquoi la chambre est-elle déjà dans le désordre ? Dans ce contexte troublant, certains objets dévoilent toute leur symbolique pour évoquer l’érotisme.

Eugène Delacroix, "Un Lit défait", 1827. Sublime !

Henri de Toulouse-Lautrec, 1896.

Œuvre du Hongrois, József Rippl-Rónai, de 1900, c'est un plaisir, non ?
pablo picasso la chambre bleue
Chef-d'œuvre absolu de Pablo Picasso, "La Chambre bleue", 1901. Picasso témoigne de son admiration pour Henri de Toulouse-Lautrec dans cette peinture de la période bleue. Sur le mur, au dessus du lit, se trouve une affiche que Toulouse-Lautrec a réalisée pour la danseuse anglaise May Milton à l'occasion d'une tournée américaine qui n'a finalement jamais eu lieu.
Pour cette affiche, Toulouse-Lautrec n'a utilisé que cinq couleurs, saturant le fond de bleu et utilisant le blanc du papier pour Milton. (voir post suivant)
Comment diable Picasso a-t-il eu connaissance de cette affiche dont seules quelques impressions sont connues ?
interieur a coilloure henri matisse
Une chambre, la plus belle et quelle modernité pour dater de 1905.
"Intérieur à Collioure", Henri Matisse.
la robe rose kees van dongen
Kees van Dongen, "La robe rose", 1919.
Le 26 janvier 1877, nait Kees Van Dongen. En 1892, il entre à l’Ecole des Arts décoratifs de Rotterdam.
Il arrive à Paris en 1897 et mène une existence misérable à Montmartre. Il collabore à l’Assiette au beurre et à d’autres hebdomadaires satiriques et se fait connaître par ses dessins caricaturaux.
Il commence à exposer en 1904 chez Vollard. En 1905, il expose au Salon d’automne, où les couleurs vives de ses œuvres sont avec celles de Vlaminck et Matisse à l’origine du nom d’un groupe de peintres : les "Fauves".
Après la Première Guerre mondiale, Kees Van Dongen entame une carrière de portraitiste de la société parisienne. Décoré de la Légion d’honneur en 1922, il obtient finalement la nationalité française en 1928.
Kees Van Dongen est décédé en son domicile à Monte-Carlo en 1968.

 

Pierre Paulus, "Le Couvre-lit Rouge".
C'est ce peintre belge qui a dessiné, en 1913, le coq qui figure sur le drapeau wallon, familièrement appelé coq hardi.

Suzanne Valadon, "La Chambre bleue", 1923.
Quelle peintre et quelle femme ! Elle est l’une des premières femmes admises à la Société nationale des beaux-arts, en 1894, et incarne une formidable liberté dans sa vie comme dans son œuvre. Fille d’une lingère du Limousin, elle est d’abord acrobate puis modèle de Puvis de Chavannes, Renoir ou Toulouse-Lautrec, avant de devenir peintre autodidacte. Elle est la mère de Maurice Utrillo.

Henri Matisse, "Nu couché", 1927.

Augusto Giacometti, " Ma chambre d’hôtel à Paris" 1938

henri matisse - photo
Henri Matisse, paralysé, dessine sur les murs de sa chambre-atelier de l’ancien hôtel Régina, à Nice, les figures de la chapelle de Vence.
Francis Bacon, "Portrait de Henrietta Moraes", 1963.
Louise Bourgeois, "Blue Bed", gravure éditée à seulement 21 exemplaires en 1998.
Et pour conclure, que serait une série "Lit" sans "La chambre de Vincent Van Gogh à Arles"

À Arles où il s’établit en février, il loue la "maison jaune" et réalise des peintures pour en décorer les murs, comme les célèbres Tournesols. Sa chambre devient même le sujet d’un tableau, dont il fournira plus tard deux autres versions. Celle-ci a été réalisée en 1889, alors qu’il était interné à l’hôpital psychiatrique de Saint-Rémy-de-Provence. Il l’a peinte spécialement pour l’offrir à sa mère. Une lettre à son frère Théo nous éclaire sur ses intentions : "La vue du tableau doit reposer la tête ou plutôt l’imagination", écrit-il. L’artiste qui traverse une période difficile apparaît clairement en quête d’apaisement. Au travers de cette œuvre, il veut suggérer le repos auquel il aspire et cherche à calmer les tourments qui l'assaillent. Seule l’étrange perspective qui définit l’espace de la chambre laisse transparaître une instabilité, une inquiétude : le mobilier semble flotter dans la pièce, le lit, déformé, glisse vers le spectateur.
van gogh chambre a arles
De nombreux artistes, et plus particulièrement de peintres, font leur un sujet, parfois banal, ils le déclinent, s'acharnent et vont jusqu'à l'obsession, cherchant à capter les différentes lumières au fil des heures d'une journée ou voulant représenter une ambiance changeante et subtile. Claude Monet, de 1892 à 1894, réalise 30 peinture de la façade de la cathédrale, de Rouen. En 1955, inspiré par Eugène Delacroix, Pablo Picasso peint une série de quinze peintures "Les Femmes d'Alger" et auparavant, 92 dessins préparatoires. Entre octobre 1888 et 1889, Vincent van Gogh, choisit le décor banal de sa chambre à Arles. La première version du tableau présente, au dessus du lit, le portrait du peintre Eugène Boch et le portrait du sous-lieutenant Paul-Eugène Milliet.
Van Gogh réalisera deux autres versions de ce tableau. Le premier ayant été abîmé par une crue du Rhône. Van Gogh peint la deuxième version en 1889 de sa chambre. Vincent van Gogh accroche alors au dessus du lit un autoportrait et un portrait féminin. Encouragé par le résultat, Van Gogh réalise une troisième version offert à sa sœur. Dans cette version, le portrait d'Eugène Boch est remplacé par l'autoportrait sans barbe, l'autre tableau ne ressemble à aucune peinture connue. Les deux sont minutieusement peints.
Extrait d’une lettre de Vincent Van Gogh à son frère Théo.
"Les murs sont d’un violet pâle. Le sol est à carreaux rouges.
Les bois du lit et les chaises sont jaune beurre frais.
Le drap et les oreillers citron vert très clair. La couverture rouge écarlate.
La fenêtre verte. La table à toilette orangée la cuvette bleue. Les portes lilas."

bedroom at arles roy lichtenstein

"Bedroom at Arles", 1992, de Roy Lichtenstein, est une interprétation en immense et pop de la "Chambre de van Gogh à Arles."
On y retrouve la même disposition que l’œuvre de van Gogh mais le mobilier a prit un petit coup de jeune !